Ne plus jamais mentir…
De Nickel L. Photo de Mariam Armisen
Si à seize ans je survivais peinement dans ce monde que je ne comprenais pas, et qui me le rendait bien, à quarante ans, ça aura pris tout le temps que ça a pris mais aujourd’hui je vis pleinement celle que je suis. Le vilain petit canard a fini par devenir un joli cygne, ou à défaut au moins un canard qui s’accepte tel qu’il est, et le revendique fasse a cette basse-cour infestée.
Le coq devant uniquement chanter, et la poule se soumettre. J’ai dit non, a ces pseudo-rituels instaurés par des hommes qui n’y connaissent que dalle au quotidien d’animaux que nous sommes.
Une vie de mensonge, oui c’est à cela que vous nous soumettez, oui une vie de soumission aux règles qui nous semblent faites pour d’autres. Peut-on rester dans un hémicycle et décider de ce qui est amoureusement faisable entre personnes ?
Cette vie de mensonge je l’ai vécue pleinement et pleinement j’ai menti, à moi-même, à cette fille, que j’aimais et qui m’aimait. A ce garçon qui m’aimait et que ma famille aimait, à cette famille que j’aimais et qui elle aimait une étrangère. Car me connaissaient-ils seulement ? Que penseraient-ils de moi ? Que dira mon père à ma mère ? Ma mère à ma tante et celle si osera t’elle me dire la vérité sur ces mots sortis pour me définir ?
J’ai menti comme tous ceux de mon espèce le font au quotidien avec plus ou moins de succès mais toujours avec ces conséquences. Car la survie nous l’imposant a bon gré mal gré.
J’en suis devenu pessimiste, oui, face a cette vie sans perspectives de bonheur, comme un horizon sans soleil, ni lune même d’ailleurs. Mais être pessimiste comme je le fus durant ces deux décennies et demie n’a pas que du mauvais. Car aux yeux du monde vous avez tout pour être heureuse ; la jeunesse, la beauté, la chance à l’école et le succès avec les hommes… Mais qu’avais je à foutre de ces hommes ? Je me le hurlais dans mes rêves obscurs et secrets, je ne rêvais que d’elles ; belles frêles tendres, douces, suaves et délicates. Je ne désirais qu’elles !
J’avais tout pour être heureuse et parfois je l’étais. Car a toujours à prévoir le pire on sait l’éviter et le voir venir de loin. Mais hélas cette posture nous faisait éviter aussi au passage, le meilleur.
Dans mon univers, tout le monde est un prince charmant au destrier blanc propriétaire d’un château en France et de drôles de personnages psychologiques en sont les châtelains ;
Le névrosé lui le rêve a longueur de journée, côtoyant de très prés le déprimé esseulé qui lui l’a longtemps perdu. A leurs côtés, j’ai rencontré le paranoïaque qui lui s’est érigé des contreforts immenses se protégeant de tout, de tous et même de l’amour, devenant parfois comme son voisin le schizophrène qui vit dans le sien en compagnie de son autre lui, le jour châtelain, la nuit courtisane. Mais les plus nombreux dans cette CASTLE VALLEY ce sont surement ces deux derniers bougres, le mythomane qui vendra le sien aux enchères à l’illusion de toutes les rêveuses et rêveurs qui auront le malheur ou le bonheur de croiser son chemin, et enfin dans cet enchevêtrement d’être et de personnalité je vous présente le pervers qui ne loue son château que pour des festins dépravés, des instants éphémères, pour des fêtes gomorrhéennes.
Mais aujourd’hui à quarante ans je suis libre… de crier ma vérité au monde, d’aimer celle que je veux, de partir libre, car au delà de nos corps qui survivent et se peine, nos âmes meurent d’avoir pas assez rêvé, osé et crié leur amour. Aujourd’hui, je suis celle-là qui offre une main, une oreille, un cœur mais plus encore une bouche, pour toutes celles qui comme moi d’il y’a deux décennies et demie à aujourd’hui, se sentent perdues et mal aimées. Je suis militante, l’assume et le revendique.
Je milite pour la liberté d’aimer celle ou celui qu’on veut afin d’être celle ou celui qu’on est réellement pour tous ceux et celle qui sont partis sans avoir vraiment été. Pour que plus jamais les âmes et les corps ne paraissent. Alors soldats aux âmes car notre liberté d’aimer est notre propre révolution.